Square Édouard Vaillant à Paris 20e



Édouard Vaillant, une conférence proposée par

Histoire et Patrimoine du 12e

 

L’association Histoire et Patrimoine du 12e organise une conférence sur

 

Édouard Vaillant, par Claude Pennetier, chercheur au CNRS,

le jeudi 8 février 2024 à 18h30,

à la salle des fêtes de la Mairie du 12e arrondissement

130 avenue Daumesnil, 75012 Paris

 

Vous retrouverez la présentation de cette conférence sur le site de l’association Histoire et Patrimoine du 12e :

https://www.histoireetpatrimoinedu12.fr/edouard-vaillant

L’inscription préalable est obligatoire : histoire.patrimoine.12@gmail.com

 

 

Portrait du député Edouard Vaillant

Édouard Vaillant © Assemblée nationale

Né en 1840 à Vierzon et décédé en 1915, villa du Bel Air dans le 12e arrondissement, ingénieur des Arts et Manufactures, militant blanquiste, Édouard Vaillant a été l’un des acteurs importants de la Commune de Paris, notamment en tant que délégué à l’instruction publique dans la commission exécutive. Il a formé, avec Jean Jaurès, Jules Guesde et Jean Allemane, le quatuor majeur du socialisme français de la fin du 19ème siècle et du début du 20ème siècle.

Les liens d’Édouard Vaillant avec le 20e arrondissement 

  • Édouard Vaillant est conseiller municipal en 1884. Cette année-là, il est élu simultanément conseiller municipal à Vierzon, sa ville natale, et dans le 20e arrondissement. Il opte pour ce dernier mandat qui lui sera renouvelé en 1887 et qu’il n’abandonnera qu’après son élection à la Chambre des députés.
  • Le 3 septembre 1893, il est élu député de la Seine  dans la 2ème circonscription du 20e arrondissement, et y sera régulièrement réélu jusqu’à sa mort en 1915.
  • Le square situé entre la mairie du 20e et l’hôpital Tenon porte le nom d’Édouard Vaillant.
Édouard Vaillant mur des Fédérés Cimetière du Père Lachaise Paris 20e

Édouard Vaillant devant le mur des Fédérés inauguré le 24 mai 1908-BnF

Jacques Delors en conférence de presse lors d'une visite d’Édouard Balladur à Bruxelles en 1993



Enfant de Ménilmontant, Jacques Delors nous a quittés

 

Jacques Delors vient de mourir ce 27 décembre 2023 et la presse nationale et européenne s’en est émue. Elle a rappelé son parcours d’homme politique arrivé jusqu’à la présidence de la Commission européenne entre 1985 et 1995. Jacques Delors, le favori des sondages aux présidentielles de 1994 et qui a pourtant décidé de « ne pas y aller ».

Sans doute plus anciens, son engagement religieux et son action syndicale ont été moins abordés, et tout commence dans le 20e. Son engagement en tant que chrétien social l’a poussé à vouloir déconfessionnaliser la CFTC. Avec d’autres responsables, il a participé à la création de la CFDT en 1964, ainsi laïcisée, c’est-à-dire en toute indépendance de l’Église.

Le mensuel le Pèlerin cite son proche collaborateur, Jérôme Vignon, qui se souvient d’un échange à Bruxelles en 1985 entre Jacques Delors et le pape : « Le pape lui en a voulu de laisser tomber la CFTC. Pour lui, il fallait revendiquer de manière visible sa foi chrétienne ».

Un riche parcours européen et français, celui d’un jeune qui avait déjà commencé à s’engager  dans nos quartiers.

Le jeune catholique pratiquant dans le 20e

Plus localement donc, Jacques Delors est né à Paris en 1925 et c’est un enfant de Ménilmontant, là où habitaient ses parents. Ses grands parents tenaient un restaurant bar, maintenant disparu, dans le 20e.

Élève brillant d’une école du quartier, il obtient son certificat d’études avec la mention « très bien », et puis il poursuit ses études au lycée Voltaire.

Jacques Delors avec ses parents en 1933

Jacques Delors avec ses parents en 1933 – Institut Jacques Delors

Ses parents étaient des catholiques pratiquants et Jacques Delors allait à une église catholique située au 130 rue Pelleport, Notre-Dame-de-Lourdes. L’église qu’il fréquentait a été détruite pour raison de sécurité et à sa place, une nouvelle église sera construite et bénie en 1980. Comme beaucoup d’enfants du quartier, il allait au patronage les jeudis et dimanches.

 À cette époque, deux patronages catholiques se partagent la rue de Ménilmontant :

– La « Jeanne d’Arc de Ménilmontant » dans le haut de la rue, créée en 1899 et liée à la paroisse Notre-Dame-de-Lourdes,

– Les « Ménilmontagnards » dans le bas de la rue, créée en 1898.

Ces patronages permettaient aux jeunes de pratiquer du sport et des activités culturelles.
Lui a fréquenté « La Jeanne d’Arc de Ménilmontant » et joué au basket. Il était considéré comme un bon joueur mais préférait le football, et allait, avec des camarades, taper le ballon dans les terrains vagues du 20e.

Sa jeune vie de cinéphile à Ménilmontant

L’une de ses passions était le cinéma ; il a créé le « Ciné-club de la Jeanne d’Arc » dans les locaux du patronage et, sous l’œil attentif du curé, projeté des films qui lui plaisaient. Il louait un projecteur de 16mm et un film. Lors de la séance, il présentait le film puis, après la projection, il animait une discussion. Ses préférences allaient aux films du néoréalisme Italien, aux films français comme « La règle du jeu » et au cinéma américain, en particulier les films d’Orson Wells et de John Houston dont la « philosophie de l’échec » l’intéressaient beaucoup. Sa mère l’a d’ailleurs inscrit à l’école du cinéma l’IDHEC, mais il cède finalement à la pression de son père et renonce à y aller. Dans une interview il disait « on devrait avoir plusieurs vies ».

Voilà pour sa jeunesse dans nos quartiers, mais sa modestie sans doute ne nous a pas permis d’en savoir davantage.

Livre "Jacques Delors" de Gabriel Milesi

Jacques Delors par Gabriel Milesi paru en 1985

 

Après Idir et les Kabyles dans le 20e, nous poursuivons notre série d’articles sur les kabyles dans le 20e. Nous abordons cette fois-ci l’origine de leur venue, le lien entre deux événements historiques parallèles qui finiront par se rejoindre. 

La troisième et dernière partie sera consacrée à L’arrivée des kabyles au XXème siècle.

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1871, une histoire «Commune»

 

Azziz El Haddad est mort le 22 août 1895, juste en face du Père Lachaise. Figure emblématique de la révolte kabyle de 1871, il habitait au 45 boulevard de Ménilmontant chez son ami et compagnon de déportation Eugène Mourot.  Il est le fils du Cheick de la Rahmaniya, et a été recherché par toutes les polices à la suite de son évasion de Nouvelle-Calédonie.

La rencontre des déportés en Nouvelle Calédonie

Azziz El Haddad est une des deux figures de proue du groupe de déportés en Nouvelle-Calédonie. Il a rencontré ses compagnons d’infortune dont Louise Michel, et Eugène Mourot, tous deux anticolonialistes, ce qui était rare à l’époque… même chez les communards. Dans ses mémoires, Louise Michel écrit :

« Un matin, dans les premiers temps de la déportation, nous vîmes arriver dans leurs grands burnous blancs, des Arabes déportés pour s’être, eux aussi, soulevés contre l’oppression. Ces orientaux, emprisonnés loin de leurs tentes et de leurs troupeaux étaient simples et bons et d’une grande justice ».

1871 Maison Carrée, Alger - Départ des forçats pour la nouvelle Calédonie

1871 Départ des forçats d Alger pour la nouvelle Calédonie – Photo J. Geiser

Puis, l’amnistie générale est déclarée en juillet 1880 pour « tous les condamnés pour faits relatifs aux insurrections de 1871 et à tous les condamnés pour crimes ou délits relatifs à des faits politiques ». Tous sauf les algériens qui, au contraire des parisiens, sont maintenus en résidence en Nouvelle-Calédonie. Azziz El Haddad, lui, décide alors de s’enfuir via l’Australie.

De son côté, Eugène Mourot, devenu conseiller municipal de Nouméa et vice-président de l’Union démocratique de propagande anticléricale, préférera ne rentrer en France qu’en 1884.

C’est ainsi que, fidèle aux amitiés nouées en captivité, à son retour en France, Eugène Mourot offre l’hospitalité à Azziz El Haddad. Celui-ci mourra en 1895, le jour-même où quelques rares survivants de la « Commune kabyle » enfin graciés, embarquaient à Nouméa pour rentrer au pays.

Une collecte effectuée parmi les anciens communards déportés a permis le rapatriement du corps du défunt en Algérie.

À l’origine,  les décisions coloniales

En Algérie, plusieurs mouvements de révolte préludent à la grande insurrection. La politique française tend à morceler les tribus et à diminuer l’influence des grandes familles. Avant tout autre, les notables se sentent menacés par la promesse de mesures telles que la libération des khammès (métayers qui recevaient le cinquième de la récolte contre leur force de travail), la confiscation de leurs terres ou des impôts considérables.

Peu à peu la révolte nobiliaire enfle précédant de peu la révolte populaire, celle des djouad ou noblesse d’épée qui possède souvent des terres [1].

Outre celles déjà citées, plusieurs causes à cette révolte dont une famine et un appauvrissement des foyers kabyles à la suite d’un hiver rigoureux en 1868-69. Et surtout, c’est la fin des « bureaux arabes », ces structures administratives mises en place par la France après la conquête de l’Algérie en 1830. Ceux-ci sont remplacés par un régime civil qui allait coûter cher aux populations locales, par une domination accrue des colons, et une aggravation de la spoliation de leurs terres.

1871, la mobilisation forcée des spahis contre la Prusse

Cette insurrection de 1871 va prendre son essor dans l’Est du pays, particulièrement dans les régions berbérophones de Kabylie. Cette révolte provient d’abord de l’échec de la politique française depuis 1830 notamment sous le Second Empire.

Le premier mouvement éclate le 20 janvier 1871, il est sans doute le plus significatif.

Il met en cause une institution, celle des spahis (régiment de cavalerie algérien), qu’on veut faire venir en France pour faire la guerre contre la Prusse, alors qu’il était entendu que ceux-ci ne devaient pas quitter leur pays.

La révolte de Soukaras - 24 février 1871

Révolte des spahis à Soukaras in Le Petit Moniteur universel – 24 février 1871

En février, d’autres révoltes apparaissent, et l’autorité française semble incapable de maintenir l’ordre, ce qui encourage un homme, comme le bachaga Mokrani, à déclencher la grande révolte.

Le 15 mars, la révolte est menée depuis le massif montagneux des Bibans en Kabylie par le cheikh El Mokrani et son frère BouMezrag, tous deux rejoints par le cheikh El Haddad. Elle soulève environ 250 tribus, soit un tiers de la population de l’Algérie. El Mokrani se retrouve à la tête de 120 000 combattants (200 000 selon les chiffres de l’Armée française).

La répression est terrible. Après en avoir fini avec les communards, des troupes françaises arrivent en renfort fin mai 1871. Le 30 juin, le fils Aziz al-Haddad se rend et le 13 juillet le cheikh al-Haddad est capturé. L’insurrection ne prend définitivement fin qu’après la capture de BouMezrag, le 20 janvier 1872.

Outre une contribution de guerre de 36,5 millions de francs-or imposée aux tribus insurgées, 446 000 hectares de terres sont séquestrés. Les kabyles sont rejetés vers les montagnes, les principaux chefs sont déportés en Guyane française ou en Nouvelle-Calédonie.

Les défenseurs de Paris - Spahis au Cours-la-Reine en février 1871

Spahis à Paris in Le Monde illustré – 18 février 1871

Il faudra attendre 1928 pour que le régime de l’indigénat français soit modifié. Ce régime, appliqué dans les territoires du second empire colonial, finira par être aboli en 1946. Un aboutissement après une demande du mouvement des Jeunes-Algériens de la suppression de ce code d’exception en 1908 et 1912, suivie d’une autre de la Ligue des droits de l’homme lors de son 20ème Congrès, en 1924.

[1] Avec les lignages maraboutiques, cette classe sociale constitue l’une des deux castes aristocratiques de la société algérienne traditionnelle

 

Prochain article : L’arrivée des kabyles en France, de la guerre 1914-1918 aux années 1950

 

Pour les membres de l’AHAV, un article long est disponible dans l’espace adhérent : Les Kabyles du XXe
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1973, les événements du 20e il y a 50 ans

1973, c’est notamment l’année de l’opération foncière au quartier Saint-Blaise. Mais tout d’abord survolons les événements parisiens de cette année-là avant d’aborder ceux du 20e arrondissement. 

Que s’est- il passé à Paris en 1973 ?

Dans la ville, les Halles de Paris sont entièrement démolies, la tour Montparnasse est inaugurée.

Au Centre de Conférence International, la signature des accords de paix annonce la fin de la guerre au Vietnam. Le journal Libération est créé, la Ligue communiste et l’Ordre Nouveau sont dissouts à la suite de leurs violents affrontements.

La chanteuse Sheila se marie, le film « Le dernier tango à Paris » sort en salle, le réalisateur Jean-Pierre Melville est décédé.

Au niveau des droits des femmes, trois mois après le procès de Bobigny et l’action de Gisèle Halimi, enterrée au Père Lachaise,  Georges Pompidou demande le 9 janvier l’ouverture d’un débat sur la contraception et l’avortement. Selon l’historienne Michelle Perrot : « 1973 est une année charnière pour les droits des femmes ».

Plus près de nous, dans le 19e, deux élèves mettent le feu à leur collège Édouard Pailleron, un bâtiment récent construit à la hâte et hautement inflammable. Bilan, 20 morts.

… et enfin à la RATP, le nouveau ticket de métro magnétique met fin au métier de poinçonneur.

Ticket RATP avant sa magnétisation

Ticket RATP poinçonné-Capture d’écran sur France TV

Il y a 50 ans dans le 20e

Côté logement et urbanisme, la ville fait disparaître les taudis en achevant 19 opérations foncières soit 64 ha, et en entamant 170 ha dont le Marais. Plus près de nous, la place des Fêtes et dans le 20e, Saint Blaise et Belleville sont également concernés.

Aux élections législatives du 4 mars, Hélène Goldet se présente à Charonne sous la bannière trotskiste, pendant que sa mère, Cécile Goldet, en fait de même mais au quartier latin et en tant que candidate socialiste. La fille : « Ma mère et moi, nous ne parlons jamais politique ». Et la mère, déjà candidate auparavant dans cette circonscription aux législatives de 1967, d’ajouter « Avant ma fille, qui a commencé à militer très jeune, n’hésitait pas à me contredire en public ». Aucune d’entre elles ne sera élue cette année-là.

Le 25 avril, le « périph » est enfin terminé avec l’inauguration du dernier tronçon par le Premier ministre, Pierre Messmer. Celui entre la porte du Pré-Saint-Gervais et la porte de Montreuil avait déjà été achevé en décembre 1969.

Le 16 mai, dans la crypte de l’église Notre-Dame-de-la-Croix cinquante-six travailleurs immigrés, dont une jeune femme tunisienne, ont fait la grève de la faim pour obtenir  » la carte de travail dès l’embauche  » et l’ abrogation de la fameuse circulaire Fontanet. Dix français les ont rejoints par solidarité pendant trois jours. Ils suspendent leur mouvement, après avoir reçu le 12 juin, un engagement écrit de la direction départementale du travail, faisant suite au feu vert de son ministère.

Maurice Dekobra est décédé le 1er juin. Enterré au Père-Lachaise, il est l’écrivain français le plus lu de l’entre-deux-guerres.

Rue Fernand Raynaud à Paris 20e

Plaque de la rue Fernand Raynaud-Wikipédia

Fernand Raynaud est mort le 28 septembre à la suite d’un accident de la route. La rue qui porte son nom lui a été dédiée par arrêté municipal du 31 janvier 1994.

Le 10 octobre, Le Monde publie un article qui fait suite aux effets  de la guerre du Kippour dans nos quartiers :

« BELLEVILLE EST CALME, MAIS… » Quand ils se battent là-bas, ici, ce n’est plus comme d’habitude  » .

Face au métro Belleville, un car bleu de la gendarmerie mobile. Un peu plus loin, vers Ménilmontant, un car gris de la police municipale… Dimanche soir déjà, trois hommes sont venus, dans une voiture, tirer une dizaine de balles de revolver dans un bar fréquenté par les Nord-Africains, au passage de la Brie, dans le dix-neuvième arrondissement.

L’acteur Noël Roquevert, est décédé le 18 novembre. Il s’était marié à la mairie du 20e le 2 février 1926 et a habité avec sa femme au 19 rue du Soleil.

Le 7 décembre, deux jeunes militants du Groupe insoumission de Paris (GIP) se sont enfermés, dans le clocher de l’église Notre-Dame-de-la-Croix. Ils « exigent la libération de Bruno Herail et des milliers de déserteurs et d’insoumis en prison ». Huit jours plus tard, une quinzaine d’adolescents sont venus les soutenir à l’extérieur « tract et guitare à la main ». Ils ont été dispersés et arrêtés par une centaine de policiers.

Enfin, en 1973, l’entreprise artisanale Oustry SMTD s’installe au 17 VILLA RIBEROLLE à l’emplacement d’anciennes écuries de Napoléon. Il s’agit d’une des dernières entreprises industrielles de sablage de verre et de métal de la capitale. Elle est dirigée par Jean Oustry et a reçu en janvier 2015 le label Entreprise du patrimoine vivant (EPV).

Quant au Père Lachaise cette année-là, le prix d’une concession à perpétuité de 2 m2 « en première ligne » vaut 9 643 F. Convertis aujourd’hui en euros et en tenant compte de l’inflation, l’équivalent s’élèverait  à 9 399 €… bien en dessous du tarif actuel, mais c’était il y a 50 ans.

Tombe d'Idir au Père Lachaise

 

Cet article inaugure une série en trois parties, toutes consacrées à l’histoire des kabyles dans le 20e. Vous pouvez y accéder directement  en cliquant directement sur les titres suivants ; Les kabyles en 1871, une histoire «Commune»  et L’arrivée des kabyles au XXème siècle.

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Idir et les kabyles dans le 20e

En hommage au chanteur Idir, le Conseil d’arrondissement du 20e a suivi le vœu du groupe « Paris en Commun ». Il a voté le 29 novembre dernier la dénomination de « square Idir » à la partie centrale de la place de Ménilmontant. Idir habitait Ménilmontant, il nous a quittés en 2020 et a été inhumé au Père-Lachaise.

 

À la mémoire de Idir

Idir, un hommage en forme de pochoir-ACB

Idir, de la Kabylie à Ménilmontant

Idir, ⵃⴰⵎⵉⴷ ⵛⴻⵔⵢⴰⵜ, en tifinagh, alphabet de la langue tamazight, est une légende de la chanson kabyle. Il nait en 1949 dans un village du Djurdjura, à 35 km de Tizi-Ouzou, capitale de la Grande-Kabylie.

Puis il vient en 1975 à Paris, et fait de Ménilmontant et de la rue des Maronites son « quartier général ». On pouvait l’y croiser presque tous les jours « Au Petit balcon » ou à « La Pétanque », des cafés du quartier. Il venait régulièrement rencontrer la communauté Kabyle, à l’ACB (Association de Culture Berbère).

Dans son dernier album, il laisse un message de ce que peut être l’ouverture dans un monde où tout semble être déterminé par le désir du repli, un message de laïcité et de citoyenneté.

Le 20e arrondissement compte une large population venue de Kabylie depuis déjà bien longtemps. Essayons d’en savoir plus.

La vie des kabyles dans le 20e

28 associations Kabyles à Paris sont notées sur le site Gralon, dont on voit ici la répartition et une concentration réelle sur et autour des 19e et 20e arrondissements de Paris.

Plan de Paris avec la localisation des 28 associations kabyles

Associations kabyles à Paris – Gralon

Depuis 1979, l’ACB (Association de Culture Berbère) est la pionnière des associations berbères à vocation socioculturelle.

L’ACB c’est déjà et un peu l’histoire de Ménilmontant, celle qui s’ouvre, peut-être, du côté du 45 boulevard de Ménilmontant avec la fraternité d’Eugène et d’Aziz. Il s’agit de l’ex-communard et le ci-devant insurgé kabyle de 1871. L’histoire se poursuit au Père Lachaise, là où repose le chanteur Idir et où se perpétue, pour l’éternité, son message de Kabyle inscrit dans l’universalité. Voilà du moins quelques-unes des figures tutélaires de cette association du 20e arrondissement.

L’originalité de cette association réside dans son action pour le rayonnement de la culture berbère. Elle propose également un accompagnement juridique, social et administratif.

L’ACB-Paris est agréée Jeunesse et Éducation populaire et, depuis 2017, elle est reconnue par la CAF comme Espace de Vie Sociale ou EVS. Elle a pour engagement la liberté de conscience, le respect du principe de non-discrimination, l’égalité femmes-hommes ou encore le souci des plus jeunes : elle met en place les outils pour pouvoir vivre et partager ses appartenances – et ressources – plurielles. 

Quelques autres associations locales

Citons parmi d’autres :

  • L’AKRED, Association des Kabyles des deux Rives Pour L’entraide Et le Développement,
  • Agir pour la Kabylie,
  • L’Association Matoub Lounès, qui transmet l’art de Matoub Lounès et promeut la culture berbère en France,
  • Kabylie équitable, association engagée dans le commerce équitable, productrice d’émissions de radio et de télévision.

Les cafetiers et la licence IV

Quant aux lieux de convivialité, les « bistrots » en particulier, remontons à la fin des années 50. A l’époque, les bougnats – nom donné aux Auvergnats montés à Paris – sont cafetiers et règnent sur un empire constitué d’hôtels, de restaurants et de bars de la capitale. Peu à peu, ils cèdent certaines affaires de l’est parisien aux Kabyles. L’indépendance de l’Algérie n’arrête en rien le processus. Avant 1962 et les accords d’Évian, seules les personnes de nationalité française pouvaient disposer de la licence IV, permettant de vendre de l’alcool à consommer sur place.

Licence IV, loide 1941

Licence IV, une législation datant de 1941-CHR

Pour éviter la perte de leur licence aux cafetiers déjà installés à Paris, des négociations amènent à ce que les ressortissants algériens soient exemptés de la condition de nationalité. C’est ainsi que les Kabyles commencent à acheter de plus en plus de cafés aux Auvergnats.

Pour la première génération d’hommes venus travailler à Paris, les cafés tenus par les Kabyles étaient des lieux de vie pour ces immigrés qui se retrouvaient isolés. Les ouvriers se retrouvaient dans ces bistrots après le travail, ou même ils habitaient dans l’hôtel au-dessus, ils pouvaient profiter du téléphone pour appeler les leurs en Algérie, ils y recevaient leur courrier, ils pouvaient bénéficier du soutien de personnes lettrées, sorte d’écrivain public, pour écrire à leur famille. Les arrière-salles servaient aussi à accueillir les « djeema », ces assemblées hebdomadaires qui les aidaient à supporter l’exil.

Chanter dans les cafés

Il ne faut pas oublier les chanteurs berbères et particulièrement kabyles qui viennent dans ces cafés pour resserrer le lien de ces immigrés avec leur terre natale, et conserver la culture kabyle. Cette production de la diaspora berbère ou amazighe est ainsi ancrée dans la langue vernaculaire des chanteurs, le tamazight ⵜⴰⵎⴰⵣⵉⵖⵜ. Les auteurs utilisent et promeuvent la variation linguistique spécifique à leur région d’origine.

Si la critique sociale et la douleur de l’exil sont toujours présentes, notamment dans la production de la première génération des immigrés représentée par Slimane Azem, un grand nombre des chansons peuvent être qualifiées de « chansons de protestation ».

Chanter en kabyle contribue pour les musiciens kabyles au maintien de leur langue et participe à la résistance à l’arabisation imposée au Maghreb[1]. En France, les chanteurs de la diaspora kabyle sont nombreux : Slimane Azem, Idir, Lounis Aït Menguellet, Lounès Matoub, Ferhat Mehenni, Karima, Malika Domrane, le groupe Djurdjura et bien d’autres.  

Parmi les plus anciens cafés :

  • Le Berbère Café devenu Le Berbère Rock Café, au coin du passage Dagorno
  • Ighouraf, à l’angle des rues des Vignoles et Buzenval
  • La Cantine des Hommes libres, rue des Maronites
La Cantine des hommes libres - 6 rue des Maronites

La Cantine des hommes libres-extrait de Ménil’info

Cette première génération fait tourner de modestes affaires, alors que la génération suivante, qui a repris la main dans les années 1990-2000, développe des affaires beaucoup plus prospères, face à la gentrification du quartier. Dans le 20e, ces restaurants, bars et autres cafés tenus par des familles kabyles sont pléthore[2].

Elle reprend peu à peu des lieux mythiques en conservant leur âme historique, comme par exemple les Folies, anciennement les Folies-Belleville.

Ou bien, elle rénove les cafés de quartier pour en faire des lieux fréquentés par la nouvelle population du 20e arrondissement :

  • les Ours,
  • les Rigoles,
  • Mr Culbuto,
  • Les nouveaux sauvages,

… et bien d’autres !

Combien d’histoires cachées de ce Paris kabyle existent encore dans nos quartiers ? À suivre, dans nos deux prochains articles, en 1871 puis au XXème siècle.

 

Pour les membres de l’AHAV, un article long est disponible dans l’espace adhérent : Les Kabyles du XXe
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[1] Voir La chanson kabyle en immigration : une rétrospective, Mehenna Mahfoufi, dans « Hommes & Migrations » 1994 n° 1179 pp. 32-39

[2] Lire : Une communauté aussi bien enracinée que mal connue, Avec les Kabyles de Ménilmontant, par Arezki Metref

Monument funéraire pour le cœur de Gambetta au Panthéon - Wikimedia Commons

 

Le destin posthume entre Gambetta et le soldat inconnu a été lié dans les années 1920. Ce 11 novembre 2023 correspond au centième anniversaire de la flamme du Soldat inconnu. Trois ans auparavant jour pour jour, une cérémonie en grande pompe avait eu lieu sous l’Arc de Triomphe pour y transférer le corps du Soldat … accompagné à cette occasion par le cœur de Gambetta.

Nous reproduisons ci-dessous notre article paru le 13 novembre 2021, année du dépôt réel des restes du Soldat inconnu. Une histoire peu connue, à rebondissements et d’ampleur nationale.

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100 ans de ravivage de la Flamme

Logo du centenaire de la Flamme sous l’Arc de Triomphe

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Gambetta et le Soldat Inconnu : destins croisés.

Entre le Panthéon et l’Arc de Triomphe

Nous sommes en 1920 et la IIIème République a officiellement 50 ans, depuis l’invasion de la France par les prussiens. Comme le pays vient à peine de sortir de la Grande Guerre contre l’Allemagne, les deux évènements se croisent cette année-là pour un même anniversaire voulu par nos parlementaires.

À l’initiative de plusieurs députés, allant du centre-gauche à la droite, une campagne de presse est organisée pour que ce 11 novembre Gambetta et le soldat inconnu puissent entrer ensemble au Panthéon.

L’objectif : rassembler les français sur des valeurs communes 

Dès le mois de juillet 1920 à la Chambre, un budget de 3,5 millions de francs est proposé pour fêter le cinquantenaire de la République. S’ajoutera un projet de loi pour transférer le cœur de Gambetta au Panthéon. Cette loi sera votée le 1er septembre 1920. 

Non sans mal puisque l’année précédente les passions politiques avaient divisé les personnes publiques sur ce projet : au camp des enthousiastes s’oppose celui du refus partiel ou total.

Glorification du Soldat Inconnu : transfert du Cœur de Gambetta. Le Défilé des Chars funèbres sous l'Arc de Triomphe. Cinquantenaire de la République. Anniversaire de l'Armistice, 11 Novembre 1927

Le char de Gambetta derrière celui du soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe
Bibliothèque municipale de Nancy-Wikimedia

Controverse à propos du Panthéon pour le Soldat inconnu

Considérant le Panthéon comme inapproprié pour le soldat inconnu, le cardinal Amette a justifié sa position dès 1919 en écrivant :

Je suis bien désireux de favoriser tout ce qui pourrait être un légitime hommage à nos chers morts de la guerre, mais il ne m’est pas possible de m’associer à la pensée que vous m’avez communiquée. Le soldat inconnu dont vous voudriez faire porter les restes au Panthéon pourrait être un soldat catholique, et il ne serait pas conforme aux sentiments d’un soldat catholique ni de sa famille que sa dépouille fût portée dans une église désaffectée et dans une cérémonie qui ne pourrait avoir aucun caractère religieux.

Et dans son édition datée du 16 septembre 1919, L’Action française ajoute :

Les catholiques n’ont pas le droit d’oublier dans quelles conditions le Panthéon a été enlevé au culte.

L’opposition à voir entrer Gambetta au Panthéon

Quant à Gambetta, le directeur de L’Intransigeant -journal tiré à 400 000 exemplaires- écrit dans son édition du 25 octobre 1920 :

Personne ne se dissimule que la fête du 11 novembre promet d’être dépourvue à la fois d’éclat et d’émotion. On s’est battu les flancs pour inventer un symbole propre à regrouper les diverses classes de la population dans un sentiment commun. Ce n’est pas le transport du cœur de Gambetta qui saura réaliser ce but ».

Cérémonie de transfert de l'urne contenant le cœur de Léon Gambetta au Panthéon de Paris

Le cœur de Gambetta porté au Panthéon par un ancien combattant
Auteur inconnu-Wikimedia

Et dans la continuité, l’Action française va plus loin dans la polémique en traitant Gambetta d’« anticlérical patenté » et même de « métèque ».

L’idée du lieu pour le soldat inconnu et pour Gambetta est donc particulièrement controversée : le soldat inconnu sera finalement inhumé le même jour que Gambetta mais là où nous le connaissons aujourd’hui, à savoir au pied de l’Arc de Triomphe.

Gambetta au cœur de la République

Pourquoi seulement le cœur de Gambetta au Panthéon ? Gambetta est décédé le 31 décembre 1882 à la suite d’une blessure mystérieuse depuis la fin novembre.  Au cours de son autopsie, son cœur est placé dans un coffret à l’intérieur de sa maison des Jardies à Sèvres (92) acquise quatre ans avant sa mort. Avant lui, Honoré de Balzac avait habité cette même maison et celle-ci est devenue actuellement le musée Gambetta, propriété de l’État.

Une cérémonie commune en deux lieux

Le cœur de Gambetta et le corps du Soldat inconnu se rejoignent ce 11 novembre 1920 pour former un même cortège depuis la place Denfert-Rochereau, sous le Lion de Belfort, symbole de la guerre de 1870. Puis, direction le Panthéon.

Le cœur de Gambetta à Denfert-Rocherreau le 11 novembre 1920 - Les fêtes du cinquantenaire de la République - Carte postale ancienne 1920

Le cœur de Gambetta à Denfert-Rochereau, lieu de départ commun du cortège avec le Soldat Inconnu-Carte postale AP

Au Panthéon, Alexandre Millerand, président de la République, prononce un discours en l’honneur de Gambetta, du Soldat inconnu et de la République. Une fois le discours et la cérémonie au Panthéon terminés, le cœur de Gambetta n’y reste pas pour autant :  il repart pour accompagner le Soldat inconnu à l’Arc de Triomphe, lieu de la seconde cérémonie… où le Soldat inconnu ne sera par ailleurs réellement déposé qu’au mois de janvier 1921. Quant au cœur de Gambetta, il était retourné au Panthéon le jour-même de la cérémonie  de 1920.

 Gambetta et le 11 novembre 1920

Le char du cœur de Gambetta traversant Paris-Carte postale LL

Les plaques commémoratives du 20e arrondissement

 

Quand les murs racontent l’histoire de la guerre 

Bulletin n°80 – Les plaques commémoratives du 20e arrondissement

 

Le 25 août 1944 marque la fin de l’occupation de Paris par les troupes allemandes commandées par le régime nazi. Depuis l’arrivée de l’occupant le 14 juin 1940, Paris a été le théâtre de nombreux drames dont les murs témoignent.

Riche d’environ 150 plaques commémoratives, le 20e arrondissement continue largement à raconter cette histoire : mémoire de la Résistance, notamment communiste, mémoire de la persécution des populations juives implantées dans cet arrondissement populaire, en particulier des enfants, mais aussi traces de l’insurrection pour la libération de Paris.

Céline LARGIER VIÉ, Maître de conférences en linguistique allemande et française à Sorbonne Nouvelle, nous avait présenté l’histoire de cette période, à travers ce que nous disent les plaques, et l’histoire de ces dernières, lors d’une conférence le 19 janvier 2023 à la mairie du 20e.

Retrouvez cette histoire dans notre nouveau bulletin qui vient de paraître.

Les bulletins sont envoyés gratuitement sous format papier à nos adhérents au fur et à mesure de leur parution.
Vous pouvez commander en ligne ce bulletin et tous les bulletins déjà parus,
sous format imprimé ou sous format pdf

Pavillon de l’Ermitage, lieu à restaurer

Pavillon de l’Ermitage, du sauvetage aux projets

Entretien avec Claire Goffaux-Espejo

 

Les 16 et 17 septembre 2023, ont lieu les Journées européennes du patrimoine, et cette année pour le 20e, le Pavillon de l’Ermitage est en pleine actualité. Claire Goffaux-Espejo nous en parle.

 

Claire Goffaux-Espejo, vous êtes déléguée auprès du maire du 20e en charge du tourisme et du patrimoine. Vos deux missions sont liées mais plus précisément de quelle manière ?

Nous travaillons actuellement à faire connaître différemment nos quartiers, le Père Lachaise et certains autres points du 20e, comme le Pavillon Carré de Baudouin… et ce fameux Pavillon de l’Ermitage que l’on cherche à restaurer, l’unique pavillon de l’époque Régence de Paris.

En ce qui concerne mes délégations, le regroupement du patrimoine et du tourisme dans une même délégation est une nouveauté bienvenue, à l’initiative du maire.

Claire GOFFAUX déléguée au patrimoine

Claire GOFFAUX dans son bureau en août 2023-PG

Le 20e dispose d’un patrimoine modeste si on le compare aux arrondissements du centre de Paris. Pas facile de le valoriser pour faire venir les touristes ?

C’est vrai au niveau du bâti par exemple. Mais de notre côté, nous avons une offre différente à proposer et ma tâche c’est de valoriser notre originalité, à l’intérieur de cette jonction de plusieurs anciens villages. Deux exemples à propos de nos lieux : nous savons proposer une autre approche du Père Lachaise à travers sa biodiversité et nous disposons de l’une des plus belles vues de Paris au niveau du belvédère du parc de Belleville.

À nous ensuite de le faire savoir, en proposant en plus des circuits touristiques. C’est le cas tout récemment avec « Le temps des cerises », un choix de plusieurs parcours autour de la Commune de 1871, rassemblés sous forme d’un bulletin tout récent et disponible notamment à l’accueil de la Mairie.

À propos de notre patrimoine local, quelles missions vous ont été plus spécialement confiées ?

Tout d’abord et dès mon arrivée, notre maire m’a demandé de m’occuper de la restauration du pavillon de l’Ermitage et de l’utiliser dans le cadre d’un projet d’activités.

Et puis d’une manière générale, j’ai pour mission de développer le tourisme en donnant une image différente du 20e. Il s’agit dans notre patrimoine, non seulement du bâti mais aussi de ceux  qui l’ont construit à travers l’histoire. Les hommes mais aussi les femmes (d’où le titre : Journées du matrimoine et du patrimoine dans le 20e) dont l’importance a souvent été oubliée dans le passé. D’ailleurs actuellement, des projets de balades sont à l’étude dans tous les arrondissements pour raconter l’histoire de Paris à travers les femmes.

Vous intervenez actuellement pour préserver le pavillon de l’Ermitage. Quelle est l’importance à vos yeux de ce pavillon dans l’arrondissement ?

Franchement j’en suis devenue amoureuse, au point d’y vouer une véritable passion. Il faut dire que ce pavillon dispose de plusieurs atouts dans sa manche : il s’agit bien sûr de l’histoire du 20e, ce qui reste du château de Bagnolet, mais il fait aussi partie de l’histoire de France à travers ce dernier bâtiment Régence de Paris. Tous ceux qui viennent le voir sont charmés, il est unique en son genre et bien situé dans le parc public particulièrement fréquenté. Et à l’intérieur, nous pouvons y admirer plusieurs anciennes peintures murales.

Votez pour sauver le pavillon de l'Ermitage

Flyer pour le vote participatif en faveur du Pavillon de l’Ermitage

Quelles sont les étapes à franchir pour la réussite de votre mission au pavillon de l’Ermitage, et où en sommes-nous actuellement ?

En premier lieu, il faut savoir que pour l’instant ce pavillon appartient au Centre d’action sociale de la Ville de Paris (CASVP). Cela dit, même si aujourd’hui elle n’en est pas légalement propriétaire, la mairie peut déjà intervenir – à l’initiative de l’Hôtel de Ville – pour faire effectuer des premiers travaux de sauvegarde. Le pavillon est actuellement fermé et n’est pas sécurisé pour le faire visiter.

Au niveau financement, on attend le résultat du budget participatif. Nous espérons un vote positif en nombre : son résultat est particulièrement important dans la validation de ce projet, non seulement par l’apport financier qu’il propose bien sûr mais surtout à travers le nombre de votants, l’importance de l’attachement exprimé par les habitants.

En attendant, une première somme a été mise à notre disposition, et l’architecte de la Direction des Affaires Culturelles de la Ville est venu plusieurs fois contrôler l’évolution de son «état de santé». Le pavillon continue de se dégrader lentement et nous avons pu en faire lister le coût des travaux, estimé actuellement à deux millions d’euros.

Parallèlement, nous arrivons à la fin d’une longue négociation avec le CASVP pour pouvoir acquérir le Pavillon au nom des habitants du 20e. Avec l’Hôtel de Ville comme troisième interlocuteur.

Dans quel délai pensez-vous finaliser votre action ?

Une fois la négociation de transfert de propriété terminée et le résultat du vote participatif, si tout va bien donc, les travaux pourront commencer dans un an. Mais sans attendre, nous avons déjà préparé la suite, un projet où les enfants pourront entrer avec des propositions qui répondent à leurs curiosités, et où tout sera gratuit.

Ils pourront venir depuis le parc et choisir de voir une expo, un reportage… Nous mettrons à disposition ce que l’on appelle les « micro-folies », une réalisation conçue et supervisée par La Villette à partir des choix de la mairie.

Le catalogue de La Villette est riche de 3000 propositions et notre responsable du pavillon Carré de Baudouin s’est déjà chargé des acquisitions. Pour l’instant, nos « micro-folies » sont itinérantes, et prêtées actuellement au centre Louis Lumière.

Concrètement, chacun pourra choisir son sujet, consultable à l’aide de projections vidéo, de tablettes et de casques de réalité virtuelle.

Ajoutons dans nos projets, une buvette mobile, un atelier d’artistes au premier étage. En résumé, un lieu dédié à l’art, la culture et le divertissement. Un lieu interactif et familial.

Y a-t-il d’autres actions liées au patrimoine, engagées dans nos quartiers ?

Un comité de réflexion travaille actuellement sur la signalétique du Père Lachaise qui va être entièrement refaite, en accord avec le conservateur et validée par l’Hôtel de Ville.

Nous travaillons aussi sur d’autres circuits thématiques, des balades spécifiques sur le patrimoine du 20e. Elles seront ensuite consultables sur le site de la Mairie.

Enfin, une carte interactive est en cours de réalisation. Vous êtes dans la rue, vous pourrez cliquer sur un lien et découvrir tout ce qui existe aux alentours, qu’il s’agisse de commerces, ou de lieux remarquables.

Tramway parisien ligne 89

L’aller-retour du tramway parisien

Nos transports en commun sont à l’ordre du jour depuis quelques mois avec notamment les travaux d’extension du métro pour les tous prochains jeux olympiques. Ils viennent également de faire l’objet, en urgence,  de décisions politiques du fait des toutes récentes émeutes à Paris : ce 4 juillet 2023, tout le trafic RATP a dû être interrompu dès 22h.

Il en a été ainsi ce jour-là de notre tramway qui, depuis 2006, roule sur le boulevard des Maréchaux avec un grand succès. L’occasion de revenir sur l’histoire plus générale du tramway parisien.

L‘origine des premiers tramways

Les premiers tramways, alors tractés par des chevaux, sont apparus aux États-Unis. La première ligne est ouverte par John Stephenson en 1832, à New York, entre Manhattan et Harlem.
Pour cette raison, le mot anglais « tramway », qui signifie tout simplement « ligne de pièces de bois guidant les roues des chariots des mines et voies », sera utilisé en France. Vingt ans plus tard, en 1855, une première ligne de tramway est mise en service à Paris entre le rond-point de Boulogne et le pont de l’Alma. Le tramway va ensuite se développer très rapidement.

Tramway hippomobile Gare du Nord – Bd de Vaugirard. CGO

Le cheval pour tracter les tramways

En 1880, on compte des milliers de chevaux à Paris pour tracter les tramways. Tous les soirs, les chevaux rejoignent leurs dépôts parisiens qui servent de greniers à fourrage, de remises de voitures, d’écuries et d’ateliers. Une multitude de métiers (palefreniers, cochers, bourreliers, maréchaux-ferrants etc.) travaillent autour de ce mode de locomotion. Très vite on se rend compte des inconvénients de la traction animale, le crottin dans les rues, le coût élevé de l’exploitation, la nécessité d’avoir des étables dans la ville, et on recherche d’autres solutions. La traction animale des tramways prend fin vers 1914.

De la traction animale à la traction mécanique

Pour remplacer la traction animale, dès 1873, on essaye la traction à vapeur, puis à air comprimé et enfin la traction électrique à partir de 1881 (présentation de la traction électrique par Siemens à l’Exposition Internationale d’Electricité de Paris).

La traction électrique des tramways est finalement retenue, de loin la plus souple et la plus économique, mais la grande difficulté réside toutefois dans l’alimentation électrique des moteurs.

Courte vie du tramway à air comprimé

Tramway à air comprimé Gare de l’Est vers 1900-wikipedia

L’alimentation par catenaire et fil aérien apparait comme la plus simple et la plus économique en installation et en utilisation. Elle est utilisée en banlieue parisienne mais refusée à Paris pour des questions d’esthétique, car les fils d’alimentation se situent à la hauteur du premier étage des immeubles.
L’alimentation par batteries est aussi essayée, mais elle ne donne pas non plus entière satisfaction à cause du poids des batteries, de leur puissance insuffisante et de la longue durée du rechargement.
La solution retenue consiste à faire passer le courant par des rails électrifiés encastrés dans le sol. Bien entendu, il faut en conséquence éliminer le risque d’électrocution des piétons ; le système Diatto à plots, donc sans catenaire, est utilisé sur certaines lignes à Paris.

Tramway à catenaire, ligne de Saint-Denis

Tramway à catenaire-Wikipedia

Il consiste en un ensemble de plots, installés entre les rails et alimentant le tramway. Ces plots se lèvent verticalement de quelques centimètres au passage du tramway et sont en contact avec la prise de courant située sous le tramway. Le système Diatto disparaît vers 1905, à la suite de dysfonctionnements et de la lourde infrastructure qu’il exige.

Les tramways parisiens à leur apogée

À la fin du 19ème siècle, la région parisienne est desservie par neuf compagnies, chacune ayant sa billetterie et des modes de transport différents.
On trouve de la traction à vapeur, à accumulateur, animale, avec catenaire, à air comprimé etc.

En 1890, le tramway a transporté 72 millions de voyageurs sur 17 lignes.
Vers 1910, une fusion s’impose entre toutes ces compagnies d’autant plus que le métro, est venu faire son apparition, ainsi que les autobus.

En 1925, on compte 122 lignes transportant des centaines de millions de voyageurs.
Ce sera le point culminant du tramway parisien.

122 lignes de tramway en 1923

plan des tramways dans le 20e en 1923- extrait STCRP

 

Le tramway funiculaire de Belleville

Un tramway particulier a été créé à la fin du 19ème siècle, celui aboutissant à Belleville.
Il avait pour but de desservir le quartier grâce à une ligne tirée par un câble. La tête de ligne se situe place de la République et doit affronter les pentes de la colline atteignant près de 8% par endroit.

Maquette avec câbles

Le funiculaire de Belleville, coupe

Le tram emprunte la rue du Faubourg du Temple et finit à l’église Saint-Jean-Baptiste de Belleville. La ligne a une longueur de 2000m à voie unique, compte tenu de l’étroitesse de la rue de Belleville.

Il s’agit-là d’un système hybride entre le tramway et le funiculaire, similaire au célèbre « cable car » de San Francisco. Le « tramway funiculaire » est mis en service en 1891 et il devient rapidement un succès. En 1902 il a transporté plus de 5 millions de voyageurs et il fonctionnera jusqu’en 1924.

La fin des tramways parisiens

À partir des années 1920, la voiture prend une place de plus en plus importante et les lignes de tramway constituent une gêne pour les automobilistes. Les autobus, beaucoup plus souples d’utilisation, ainsi que la concurrence du métro, conduit à partir des années 1930 à décider le remplacement des tramways parisiens par des autobus.

Embouteillage parisien début 20e siècle

Encombrement de tramways place du Châtelet vers 1920-Wikimedia

En huit années, de 1930 à 1938, ce sera chose faite : dans Paris et sa banlieue, des centaines de kilomètres de lignes de tramway disparaissent et le dernier tramway parisien arrêtera son service le 14 mars 1937.
Les dépôts de tramways sont alors transformés en dépôts d’autobus et c’est la fin provisoire du tramway à Paris.

Le renouveau du tramway à Paris

La politique du tout automobile triomphe dans les années1960-1970, au point que la ville envisage dans un premier temps de construire une autoroute nord–sud en empruntant le tracé du canal Saint Martin.

L’accroissement constant du nombre d’automobiles crée des problèmes de stationnement et de circulation insolubles. Face à cela, la politique d’élargissement des rues et la création de parkings souterrains n‘a pas suffisamment permis de faciliter la fluidité dans les rues. Bien au contraire, ces divers aménagements ont entrainé l’arrivée de plus en plus de véhicules et la circulation -pour les autobus comme pour les voitures- est devenue très difficile. Pour les bus, la mise en place des premiers couloirs réservés parviendra à leur faire obtenir quelques résultats significatifs.

D’une manière générale, lorsque le choc pétrolier de 1973 arrive en France, il entraîne une réflexion générale sur la politique des transports. Le maire de Paris, Jean Tiberi, appuyé par les Verts, défend l’idée du retour du tramway.

La concrétisation du projet

Tout d’abord, la ville envisage d’utiliser la voie de la « petite ceinture », et puis après beaucoup de débats cette solution va finalement être abandonnée.

Il faut attendre janvier 2001 pour que le Conseil de Paris valide le lancement d’une concertation préalable en faveur de la réalisation du tramway que nous connaissons, celui mis en place sur les boulevards des Maréchaux.  L’avantage de la largeur des boulevards permet aux tramways de leur créer deux voies centrales réservées, avec une alimentation par catenaire et fil.

Et dans la continuité, le nouvel exécutif parisien élu en mars 2001 autour du maire Bertrand Delanoë, reprend à son compte le projet : la concertation préalable se déroule entre mai et juillet. L’enquête publique entre février à avril 2003 aboutit deux mois plus tard à un avis favorable. Les travaux débutent en 2003 et les aménagements s’achèvent en octobre 2006.

Un mois plus tard, après soixante-neuf ans d’absence, la ligne T3 marque le grand retour du tramway à Paris. Elle est inaugurée le 16 décembre 2006 par Bertrand Delanoë. Elle sera, six ans plus tard, prolongée et scindée en deux lignes, T3a et T3b.

Le succès de fréquentation

Le nombre de passagers atteindra un niveau très supérieur aux prévisions, mais avec par ailleurs deux points noirs : la vitesse moyenne de circulation qui était prévue de 20km /heure n’est pas atteinte et sa régularité n’est pas encore jugée satisfaisante.

Actuellement, le prolongement du tramway T3 est envisagé pour aller de la Porte de Vincennes à la place de la Nation. Ce prolongement pourrait offrir une correspondance avec des lignes de métro ainsi qu’avec la A du RER.

Signalons enfin qu’un passager en tramway consomme, à trajet égal, environ 15 fois moins d’énergie qu’un passager dans une voiture ce qui, compte tenu du réchauffement climatique, n’est pas négligeable.

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Pour en savoir plus :

https://trainconsultant.com/2021/02/28/quand-paris-avait-vraiment-beaucoup-de-tramways/

https://www.cairn.info/revue-transports-urbains-2007-1-page-11.htm