L’aller-retour du tramway à Paris
L’aller-retour du tramway parisien
Nos transports en commun sont à l’ordre du jour depuis quelques mois avec notamment les travaux d’extension du métro pour les tous prochains jeux olympiques. Ils viennent également de faire l’objet, en urgence, de décisions politiques du fait des toutes récentes émeutes à Paris : ce 4 juillet 2023, tout le trafic RATP a dû être interrompu dès 22h.
Il en a été ainsi ce jour-là de notre tramway qui, depuis 2006, roule sur le boulevard des Maréchaux avec un grand succès. L’occasion de revenir sur l’histoire plus générale du tramway parisien.
L‘origine des premiers tramways
Les premiers tramways, alors tractés par des chevaux, sont apparus aux États-Unis. La première ligne est ouverte par John Stephenson en 1832, à New York, entre Manhattan et Harlem.
Pour cette raison, le mot anglais « tramway », qui signifie tout simplement « ligne de pièces de bois guidant les roues des chariots des mines et voies », sera utilisé en France. Vingt ans plus tard, en 1855, une première ligne de tramway est mise en service à Paris entre le rond-point de Boulogne et le pont de l’Alma. Le tramway va ensuite se développer très rapidement.
Le cheval pour tracter les tramways
En 1880, on compte des milliers de chevaux à Paris pour tracter les tramways. Tous les soirs, les chevaux rejoignent leurs dépôts parisiens qui servent de greniers à fourrage, de remises de voitures, d’écuries et d’ateliers. Une multitude de métiers (palefreniers, cochers, bourreliers, maréchaux-ferrants etc.) travaillent autour de ce mode de locomotion. Très vite on se rend compte des inconvénients de la traction animale, le crottin dans les rues, le coût élevé de l’exploitation, la nécessité d’avoir des étables dans la ville, et on recherche d’autres solutions. La traction animale des tramways prend fin vers 1914.
De la traction animale à la traction mécanique
Pour remplacer la traction animale, dès 1873, on essaye la traction à vapeur, puis à air comprimé et enfin la traction électrique à partir de 1881 (présentation de la traction électrique par Siemens à l’Exposition Internationale d’Electricité de Paris).
La traction électrique des tramways est finalement retenue, de loin la plus souple et la plus économique, mais la grande difficulté réside toutefois dans l’alimentation électrique des moteurs.
L’alimentation par catenaire et fil aérien apparait comme la plus simple et la plus économique en installation et en utilisation. Elle est utilisée en banlieue parisienne mais refusée à Paris pour des questions d’esthétique, car les fils d’alimentation se situent à la hauteur du premier étage des immeubles.
L’alimentation par batteries est aussi essayée, mais elle ne donne pas non plus entière satisfaction à cause du poids des batteries, de leur puissance insuffisante et de la longue durée du rechargement.
La solution retenue consiste à faire passer le courant par des rails électrifiés encastrés dans le sol. Bien entendu, il faut en conséquence éliminer le risque d’électrocution des piétons ; le système Diatto à plots, donc sans catenaire, est utilisé sur certaines lignes à Paris.
Il consiste en un ensemble de plots, installés entre les rails et alimentant le tramway. Ces plots se lèvent verticalement de quelques centimètres au passage du tramway et sont en contact avec la prise de courant située sous le tramway. Le système Diatto disparaît vers 1905, à la suite de dysfonctionnements et de la lourde infrastructure qu’il exige.
Les tramways parisiens à leur apogée
À la fin du 19ème siècle, la région parisienne est desservie par neuf compagnies, chacune ayant sa billetterie et des modes de transport différents.
On trouve de la traction à vapeur, à accumulateur, animale, avec catenaire, à air comprimé etc.
En 1890, le tramway a transporté 72 millions de voyageurs sur 17 lignes.
Vers 1910, une fusion s’impose entre toutes ces compagnies d’autant plus que le métro, est venu faire son apparition, ainsi que les autobus.
En 1925, on compte 122 lignes transportant des centaines de millions de voyageurs.
Ce sera le point culminant du tramway parisien.
Le tramway funiculaire de Belleville
Un tramway particulier a été créé à la fin du 19ème siècle, celui aboutissant à Belleville.
Il avait pour but de desservir le quartier grâce à une ligne tirée par un câble. La tête de ligne se situe place de la République et doit affronter les pentes de la colline atteignant près de 8% par endroit.
Le tram emprunte la rue du Faubourg du Temple et finit à l’église Saint-Jean-Baptiste de Belleville. La ligne a une longueur de 2000m à voie unique, compte tenu de l’étroitesse de la rue de Belleville.
Il s’agit-là d’un système hybride entre le tramway et le funiculaire, similaire au célèbre « cable car » de San Francisco. Le « tramway funiculaire » est mis en service en 1891 et il devient rapidement un succès. En 1902 il a transporté plus de 5 millions de voyageurs et il fonctionnera jusqu’en 1924.
La fin des tramways parisiens
À partir des années 1920, la voiture prend une place de plus en plus importante et les lignes de tramway constituent une gêne pour les automobilistes. Les autobus, beaucoup plus souples d’utilisation, ainsi que la concurrence du métro, conduit à partir des années 1930 à décider le remplacement des tramways parisiens par des autobus.
En huit années, de 1930 à 1938, ce sera chose faite : dans Paris et sa banlieue, des centaines de kilomètres de lignes de tramway disparaissent et le dernier tramway parisien arrêtera son service le 14 mars 1937.
Les dépôts de tramways sont alors transformés en dépôts d’autobus et c’est la fin provisoire du tramway à Paris.
Le renouveau du tramway à Paris
La politique du tout automobile triomphe dans les années1960-1970, au point que la ville envisage dans un premier temps de construire une autoroute nord–sud en empruntant le tracé du canal Saint Martin.
L’accroissement constant du nombre d’automobiles crée des problèmes de stationnement et de circulation insolubles. Face à cela, la politique d’élargissement des rues et la création de parkings souterrains n‘a pas suffisamment permis de faciliter la fluidité dans les rues. Bien au contraire, ces divers aménagements ont entrainé l’arrivée de plus en plus de véhicules et la circulation -pour les autobus comme pour les voitures- est devenue très difficile. Pour les bus, la mise en place des premiers couloirs réservés parviendra à leur faire obtenir quelques résultats significatifs.
D’une manière générale, lorsque le choc pétrolier de 1973 arrive en France, il entraîne une réflexion générale sur la politique des transports. Le maire de Paris, Jean Tiberi, appuyé par les Verts, défend l’idée du retour du tramway.
La concrétisation du projet
Tout d’abord, la ville envisage d’utiliser la voie de la « petite ceinture », et puis après beaucoup de débats cette solution va finalement être abandonnée.
Il faut attendre janvier 2001 pour que le Conseil de Paris valide le lancement d’une concertation préalable en faveur de la réalisation du tramway que nous connaissons, celui mis en place sur les boulevards des Maréchaux. L’avantage de la largeur des boulevards permet aux tramways de leur créer deux voies centrales réservées, avec une alimentation par catenaire et fil.
Et dans la continuité, le nouvel exécutif parisien élu en mars 2001 autour du maire Bertrand Delanoë, reprend à son compte le projet : la concertation préalable se déroule entre mai et juillet. L’enquête publique entre février à avril 2003 aboutit deux mois plus tard à un avis favorable. Les travaux débutent en 2003 et les aménagements s’achèvent en octobre 2006.
Un mois plus tard, après soixante-neuf ans d’absence, la ligne T3 marque le grand retour du tramway à Paris. Elle est inaugurée le 16 décembre 2006 par Bertrand Delanoë. Elle sera, six ans plus tard, prolongée et scindée en deux lignes, T3a et T3b.
Le succès de fréquentation
Le nombre de passagers atteindra un niveau très supérieur aux prévisions, mais avec par ailleurs deux points noirs : la vitesse moyenne de circulation qui était prévue de 20km /heure n’est pas atteinte et sa régularité n’est pas encore jugée satisfaisante.
Actuellement, le prolongement du tramway T3 est envisagé pour aller de la Porte de Vincennes à la place de la Nation. Ce prolongement pourrait offrir une correspondance avec des lignes de métro ainsi qu’avec la A du RER.
Signalons enfin qu’un passager en tramway consomme, à trajet égal, environ 15 fois moins d’énergie qu’un passager dans une voiture ce qui, compte tenu du réchauffement climatique, n’est pas négligeable.
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Pour en savoir plus :
https://trainconsultant.com/2021/02/28/quand-paris-avait-vraiment-beaucoup-de-tramways/
https://www.cairn.info/revue-transports-urbains-2007-1-page-11.htm
L’aller-retour du tramway à Paris
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