Tombe d'Idir au Père Lachaise

 

Cet article inaugure une série en trois parties, toutes consacrées à l’histoire des kabyles dans le 20e. Vous pouvez y accéder directement  en cliquant directement sur les titres suivants ; Les kabyles en 1871, une histoire «Commune»  et L’arrivée des kabyles au XXème siècle.

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Idir et les kabyles dans le 20e

En hommage au chanteur Idir, le Conseil d’arrondissement du 20e a suivi le vœu du groupe « Paris en Commun ». Il a voté le 29 novembre dernier la dénomination de « square Idir » à la partie centrale de la place de Ménilmontant. Idir habitait Ménilmontant, il nous a quittés en 2020 et a été inhumé au Père-Lachaise.

 

À la mémoire de Idir

Idir, un hommage en forme de pochoir-ACB

Idir, de la Kabylie à Ménilmontant

Idir, ⵃⴰⵎⵉⴷ ⵛⴻⵔⵢⴰⵜ, en tifinagh, alphabet de la langue tamazight, est une légende de la chanson kabyle. Il nait en 1949 dans un village du Djurdjura, à 35 km de Tizi-Ouzou, capitale de la Grande-Kabylie.

Puis il vient en 1975 à Paris, et fait de Ménilmontant et de la rue des Maronites son « quartier général ». On pouvait l’y croiser presque tous les jours « Au Petit balcon » ou à « La Pétanque », des cafés du quartier. Il venait régulièrement rencontrer la communauté Kabyle, à l’ACB (Association de Culture Berbère).

Dans son dernier album, il laisse un message de ce que peut être l’ouverture dans un monde où tout semble être déterminé par le désir du repli, un message de laïcité et de citoyenneté.

Le 20e arrondissement compte une large population venue de Kabylie depuis déjà bien longtemps. Essayons d’en savoir plus.

La vie des kabyles dans le 20e

28 associations Kabyles à Paris sont notées sur le site Gralon, dont on voit ici la répartition et une concentration réelle sur et autour des 19e et 20e arrondissements de Paris.

Plan de Paris avec la localisation des 28 associations kabyles

Associations kabyles à Paris – Gralon

Depuis 1979, l’ACB (Association de Culture Berbère) est la pionnière des associations berbères à vocation socioculturelle.

L’ACB c’est déjà et un peu l’histoire de Ménilmontant, celle qui s’ouvre, peut-être, du côté du 45 boulevard de Ménilmontant avec la fraternité d’Eugène et d’Aziz. Il s’agit de l’ex-communard et le ci-devant insurgé kabyle de 1871. L’histoire se poursuit au Père Lachaise, là où repose le chanteur Idir et où se perpétue, pour l’éternité, son message de Kabyle inscrit dans l’universalité. Voilà du moins quelques-unes des figures tutélaires de cette association du 20e arrondissement.

L’originalité de cette association réside dans son action pour le rayonnement de la culture berbère. Elle propose également un accompagnement juridique, social et administratif.

L’ACB-Paris est agréée Jeunesse et Éducation populaire et, depuis 2017, elle est reconnue par la CAF comme Espace de Vie Sociale ou EVS. Elle a pour engagement la liberté de conscience, le respect du principe de non-discrimination, l’égalité femmes-hommes ou encore le souci des plus jeunes : elle met en place les outils pour pouvoir vivre et partager ses appartenances – et ressources – plurielles. 

Quelques autres associations locales

Citons parmi d’autres :

  • L’AKRED, Association des Kabyles des deux Rives Pour L’entraide Et le Développement,
  • Agir pour la Kabylie,
  • L’Association Matoub Lounès, qui transmet l’art de Matoub Lounès et promeut la culture berbère en France,
  • Kabylie équitable, association engagée dans le commerce équitable, productrice d’émissions de radio et de télévision.

Les cafetiers et la licence IV

Quant aux lieux de convivialité, les « bistrots » en particulier, remontons à la fin des années 50. A l’époque, les bougnats – nom donné aux Auvergnats montés à Paris – sont cafetiers et règnent sur un empire constitué d’hôtels, de restaurants et de bars de la capitale. Peu à peu, ils cèdent certaines affaires de l’est parisien aux Kabyles. L’indépendance de l’Algérie n’arrête en rien le processus. Avant 1962 et les accords d’Évian, seules les personnes de nationalité française pouvaient disposer de la licence IV, permettant de vendre de l’alcool à consommer sur place.

Licence IV, loide 1941

Licence IV, une législation datant de 1941-CHR

Pour éviter la perte de leur licence aux cafetiers déjà installés à Paris, des négociations amènent à ce que les ressortissants algériens soient exemptés de la condition de nationalité. C’est ainsi que les Kabyles commencent à acheter de plus en plus de cafés aux Auvergnats.

Pour la première génération d’hommes venus travailler à Paris, les cafés tenus par les Kabyles étaient des lieux de vie pour ces immigrés qui se retrouvaient isolés. Les ouvriers se retrouvaient dans ces bistrots après le travail, ou même ils habitaient dans l’hôtel au-dessus, ils pouvaient profiter du téléphone pour appeler les leurs en Algérie, ils y recevaient leur courrier, ils pouvaient bénéficier du soutien de personnes lettrées, sorte d’écrivain public, pour écrire à leur famille. Les arrière-salles servaient aussi à accueillir les « djeema », ces assemblées hebdomadaires qui les aidaient à supporter l’exil.

Chanter dans les cafés

Il ne faut pas oublier les chanteurs berbères et particulièrement kabyles qui viennent dans ces cafés pour resserrer le lien de ces immigrés avec leur terre natale, et conserver la culture kabyle. Cette production de la diaspora berbère ou amazighe est ainsi ancrée dans la langue vernaculaire des chanteurs, le tamazight ⵜⴰⵎⴰⵣⵉⵖⵜ. Les auteurs utilisent et promeuvent la variation linguistique spécifique à leur région d’origine.

Si la critique sociale et la douleur de l’exil sont toujours présentes, notamment dans la production de la première génération des immigrés représentée par Slimane Azem, un grand nombre des chansons peuvent être qualifiées de « chansons de protestation ».

Chanter en kabyle contribue pour les musiciens kabyles au maintien de leur langue et participe à la résistance à l’arabisation imposée au Maghreb[1]. En France, les chanteurs de la diaspora kabyle sont nombreux : Slimane Azem, Idir, Lounis Aït Menguellet, Lounès Matoub, Ferhat Mehenni, Karima, Malika Domrane, le groupe Djurdjura et bien d’autres.  

Parmi les plus anciens cafés :

  • Le Berbère Café devenu Le Berbère Rock Café, au coin du passage Dagorno
  • Ighouraf, à l’angle des rues des Vignoles et Buzenval
  • La Cantine des Hommes libres, rue des Maronites
La Cantine des hommes libres - 6 rue des Maronites

La Cantine des hommes libres-extrait de Ménil’info

Cette première génération fait tourner de modestes affaires, alors que la génération suivante, qui a repris la main dans les années 1990-2000, développe des affaires beaucoup plus prospères, face à la gentrification du quartier. Dans le 20e, ces restaurants, bars et autres cafés tenus par des familles kabyles sont pléthore[2].

Elle reprend peu à peu des lieux mythiques en conservant leur âme historique, comme par exemple les Folies, anciennement les Folies-Belleville.

Ou bien, elle rénove les cafés de quartier pour en faire des lieux fréquentés par la nouvelle population du 20e arrondissement :

  • les Ours,
  • les Rigoles,
  • Mr Culbuto,
  • Les nouveaux sauvages,

… et bien d’autres !

Combien d’histoires cachées de ce Paris kabyle existent encore dans nos quartiers ? À suivre, dans nos deux prochains articles, en 1871 puis au XXème siècle.

 

Pour les membres de l’AHAV, un article long est disponible dans l’espace adhérent : Les Kabyles du XXe
(Merci de vous identifier dans Mon espace adhérent / Connexion avant de cliquer sur le lien pour y accéder)


[1] Voir La chanson kabyle en immigration : une rétrospective, Mehenna Mahfoufi, dans « Hommes & Migrations » 1994 n° 1179 pp. 32-39

[2] Lire : Une communauté aussi bien enracinée que mal connue, Avec les Kabyles de Ménilmontant, par Arezki Metref

Père Lachaise, conférence par Benoît Gallot

Réfection des marches menant au mur des Fédérés, septembre 2023-PG

Le Père Lachaise, patrimoine vivant

Cette conférence a lieu le

 

📅 Jeudi 19 octobre 2023
🕒 à 18h30 précises
📍 à la Mairie du 20e

 

Le Père Lachaise tient une place originale dans le 20e en tant que cimetière le plus

visité au monde. Un “musée à ciel ouvert” également bien vivant. Sa faune et sa flore,

l’activité humaine de ce service public méritent d’être mieux connues.

Le Père Lachaise, comment ça marche ?

 

Par Benoît GALLOT, conservateur du lieu et auteur de “la vie secrète d’un cimetière”

Livre sur le Père Lachaise

La vie secrète d’un cimetière, par Benoit Gallot-Les Arènes

Pavillon de l’Ermitage, lieu à restaurer

Pavillon de l’Ermitage, du sauvetage aux projets

Entretien avec Claire Goffaux-Espejo

 

Les 16 et 17 septembre 2023, ont lieu les Journées européennes du patrimoine, et cette année pour le 20e, le Pavillon de l’Ermitage est en pleine actualité. Claire Goffaux-Espejo nous en parle.

 

Claire Goffaux-Espejo, vous êtes déléguée auprès du maire du 20e en charge du tourisme et du patrimoine. Vos deux missions sont liées mais plus précisément de quelle manière ?

Nous travaillons actuellement à faire connaître différemment nos quartiers, le Père Lachaise et certains autres points du 20e, comme le Pavillon Carré de Baudouin… et ce fameux Pavillon de l’Ermitage que l’on cherche à restaurer, l’unique pavillon de l’époque Régence de Paris.

En ce qui concerne mes délégations, le regroupement du patrimoine et du tourisme dans une même délégation est une nouveauté bienvenue, à l’initiative du maire.

Claire GOFFAUX déléguée au patrimoine

Claire GOFFAUX dans son bureau en août 2023-PG

Le 20e dispose d’un patrimoine modeste si on le compare aux arrondissements du centre de Paris. Pas facile de le valoriser pour faire venir les touristes ?

C’est vrai au niveau du bâti par exemple. Mais de notre côté, nous avons une offre différente à proposer et ma tâche c’est de valoriser notre originalité, à l’intérieur de cette jonction de plusieurs anciens villages. Deux exemples à propos de nos lieux : nous savons proposer une autre approche du Père Lachaise à travers sa biodiversité et nous disposons de l’une des plus belles vues de Paris au niveau du belvédère du parc de Belleville.

À nous ensuite de le faire savoir, en proposant en plus des circuits touristiques. C’est le cas tout récemment avec « Le temps des cerises », un choix de plusieurs parcours autour de la Commune de 1871, rassemblés sous forme d’un bulletin tout récent et disponible notamment à l’accueil de la Mairie.

À propos de notre patrimoine local, quelles missions vous ont été plus spécialement confiées ?

Tout d’abord et dès mon arrivée, notre maire m’a demandé de m’occuper de la restauration du pavillon de l’Ermitage et de l’utiliser dans le cadre d’un projet d’activités.

Et puis d’une manière générale, j’ai pour mission de développer le tourisme en donnant une image différente du 20e. Il s’agit dans notre patrimoine, non seulement du bâti mais aussi de ceux  qui l’ont construit à travers l’histoire. Les hommes mais aussi les femmes (d’où le titre : Journées du matrimoine et du patrimoine dans le 20e) dont l’importance a souvent été oubliée dans le passé. D’ailleurs actuellement, des projets de balades sont à l’étude dans tous les arrondissements pour raconter l’histoire de Paris à travers les femmes.

Vous intervenez actuellement pour préserver le pavillon de l’Ermitage. Quelle est l’importance à vos yeux de ce pavillon dans l’arrondissement ?

Franchement j’en suis devenue amoureuse, au point d’y vouer une véritable passion. Il faut dire que ce pavillon dispose de plusieurs atouts dans sa manche : il s’agit bien sûr de l’histoire du 20e, ce qui reste du château de Bagnolet, mais il fait aussi partie de l’histoire de France à travers ce dernier bâtiment Régence de Paris. Tous ceux qui viennent le voir sont charmés, il est unique en son genre et bien situé dans le parc public particulièrement fréquenté. Et à l’intérieur, nous pouvons y admirer plusieurs anciennes peintures murales.

Votez pour sauver le pavillon de l'Ermitage

Flyer pour le vote participatif en faveur du Pavillon de l’Ermitage

Quelles sont les étapes à franchir pour la réussite de votre mission au pavillon de l’Ermitage, et où en sommes-nous actuellement ?

En premier lieu, il faut savoir que pour l’instant ce pavillon appartient au Centre d’action sociale de la Ville de Paris (CASVP). Cela dit, même si aujourd’hui elle n’en est pas légalement propriétaire, la mairie peut déjà intervenir – à l’initiative de l’Hôtel de Ville – pour faire effectuer des premiers travaux de sauvegarde. Le pavillon est actuellement fermé et n’est pas sécurisé pour le faire visiter.

Au niveau financement, on attend le résultat du budget participatif. Nous espérons un vote positif en nombre : son résultat est particulièrement important dans la validation de ce projet, non seulement par l’apport financier qu’il propose bien sûr mais surtout à travers le nombre de votants, l’importance de l’attachement exprimé par les habitants.

En attendant, une première somme a été mise à notre disposition, et l’architecte de la Direction des Affaires Culturelles de la Ville est venu plusieurs fois contrôler l’évolution de son «état de santé». Le pavillon continue de se dégrader lentement et nous avons pu en faire lister le coût des travaux, estimé actuellement à deux millions d’euros.

Parallèlement, nous arrivons à la fin d’une longue négociation avec le CASVP pour pouvoir acquérir le Pavillon au nom des habitants du 20e. Avec l’Hôtel de Ville comme troisième interlocuteur.

Dans quel délai pensez-vous finaliser votre action ?

Une fois la négociation de transfert de propriété terminée et le résultat du vote participatif, si tout va bien donc, les travaux pourront commencer dans un an. Mais sans attendre, nous avons déjà préparé la suite, un projet où les enfants pourront entrer avec des propositions qui répondent à leurs curiosités, et où tout sera gratuit.

Ils pourront venir depuis le parc et choisir de voir une expo, un reportage… Nous mettrons à disposition ce que l’on appelle les « micro-folies », une réalisation conçue et supervisée par La Villette à partir des choix de la mairie.

Le catalogue de La Villette est riche de 3000 propositions et notre responsable du pavillon Carré de Baudouin s’est déjà chargé des acquisitions. Pour l’instant, nos « micro-folies » sont itinérantes, et prêtées actuellement au centre Louis Lumière.

Concrètement, chacun pourra choisir son sujet, consultable à l’aide de projections vidéo, de tablettes et de casques de réalité virtuelle.

Ajoutons dans nos projets, une buvette mobile, un atelier d’artistes au premier étage. En résumé, un lieu dédié à l’art, la culture et le divertissement. Un lieu interactif et familial.

Y a-t-il d’autres actions liées au patrimoine, engagées dans nos quartiers ?

Un comité de réflexion travaille actuellement sur la signalétique du Père Lachaise qui va être entièrement refaite, en accord avec le conservateur et validée par l’Hôtel de Ville.

Nous travaillons aussi sur d’autres circuits thématiques, des balades spécifiques sur le patrimoine du 20e. Elles seront ensuite consultables sur le site de la Mairie.

Enfin, une carte interactive est en cours de réalisation. Vous êtes dans la rue, vous pourrez cliquer sur un lien et découvrir tout ce qui existe aux alentours, qu’il s’agisse de commerces, ou de lieux remarquables.

Pavillon de l'Ermitage rue de Bagnolet

Chef d’œuvre en péril : le pavillon de l’Ermitage

 

La conférence est présentée par Christiane Demeulenaere-Douyère, vice-présidente de l’AHAV

Elle a lieu

📅 Dimanche 17 septembre
🕒 À 15h
📍  Au Mama Shelter Paris East, 109 rue de Bagnolet

Au coin de la rue de Bagnolet et de celle des Balkans, se dresse encore une jolie grille de style Régence. Elle cache le Pavillon de l’Ermitage qui est un rare témoignage architectural du passé aristocratique de l’ancien village de Charonne qui a survécu au passage du temps.

Aujourd’hui, le Pavillon de l’Ermitage fait triste figure. Il est fermé depuis longtemps au public et son état matériel se dégrade de jour en jour… Il est grand temps de songer à lui rendre sa splendeur d’antan.

Mais avant de parler d’un avenir que nous espérons tous radieux et prochain, nous retracerons l’histoire de ce lieu, de ses heures de gloire du parc du château de Bagnolet aux années plus grises du vieil hospice Alquier-Debrousse.

Pavillon de l'Ermitage près de l'entrée de l'Hospice

Hospice DEBROUSSE, l’entrée rue de Bagnolet vers 1900

Budget participatif 2023

La rénovation du Pavillon de l’Ermitage est inscrite, à l’initiative de notre association (AHAV), parmi les demandes présentées au Budget participatif 2023 de la Ville de Paris. Nous vous remercions de nous aider par vos votes à soutenir ce projet 

 

Votez pour sauver le Pavillon de l'Ermitage !

Flyer soutenant le vote participatif en faveur du Pavillon de l’Ermitage

… Et consulter le lien suivant pour savoir comment voter pour les idées du budget participatif.

Décor en mosaïque d'Orphée sur le mur du kiosque du square Sarah Bernhardt

La « Divine » Sarah Bernhardt, actrice tout autant qu’artiste, première « star » internationale, fait l’objet d’une exposition au Petit Palais jusqu’au 27 août 2023, à l’occasion du centenaire de sa mort.

Un square porte son nom dans notre 20e arrondissement, près du cours de Vincennes.

Ce square accueille près de 200 arbres réunissant 50 espèces différentes, des sophoras du Japon, des ginkgo biloba, des peupliers noirs, des tilleuls, mais aussi des arbustes : noisetiers, forsythias, cornouillers, oliviers, lauriers et photinias.

Des bâtiments en béton rosé dans le square Sarah Bernhardt

 

Le square Sarah Bernhardt - photographie du kiosque à musique

Le square Sarah Bernhardt – le kiosque à musique derrière les arbres – VV

Les différents bâtiments, typiques des années 30, sont construits en béton rosé et présentent d’élégantes lignes courbes.

Le kiosque à musique est orné de décors en mosaïque représentant Orphée sur le mur et des instruments de musique sur le sol.

Dans l’angle nord-est du parc se dresse un grand abri dont le sol est revêtu d’une mosaïque représentant des animaux des différents continents.

Une fontaine de 33 m de diamètre devait constituer la pièce centrale du square, mais sa structure présente des altérations peu de temps après sa mise en service. Elle est rapidement mise hors d’eau, c’est aujourd’hui une aire de jeux pour enfants.

Au sud-est s’élève un obélisque dont l’origine semble mystérieuse : il existait déjà sur les photographies de l’inauguration du square en 1936. La délibération du Conseil Municipal de Paris du 12 juillet 1934 qui décrit les espaces verts projetés spécifie la fontaine, le kiosque à musique et l’abri de l’angle, mais il n’est fait aucune mention d’un obélisque ou d’une pyramide.

Les seules indications fournies actuellement par la Ville de Paris sont les suivantes : « L’obélisque n’est pas sans rappeler celui du square René-Le Gall (13e). Il est typique des années 30». Le square René-Le-Gall a été créé un peu plus tardivement et son obélisque n’est pas en béton mais en pierres meulières, il était même hérissé de petites touffes d’herbes lors de l’inauguration du square Le Gall en 1938. Le mystère reste donc entier….

Le square Sarah Bernhardt - photographie de l'obélisque

Le square Sarah Bernhardt – l’obélisque – VV

 

Sous le square, l’usine à gaz

Le square Sarah Bernhardt et son voisin le square Réjane ont été aménagés sur un terrain moins verdoyant, où était implantée l’usine à gaz de Saint-Mandé : jusqu’à l’annexion de 1860, la toute petite partie de l’actuel 20e arrondissement située au sud de la rue de Lagny appartenait à la commune de Saint-Mandé.

En 1855, la Compagnie Parisienne du Gaz décide de construire de nouvelles usines à gaz sur des sites à l’extérieur de l’enceinte des fermiers généraux. Elle cherche à limiter les nuisances de cette industrie polluante sur les riverains en s’installant dans des quartiers peu urbanisés.

Ainsi, l’usine de Saint-Mandé s’établit le long du cours de Vincennes. Mais l’expansion foncière rattrape rapidement ces implantations.

Pour faire face à une demande croissante, les installations de l’usine à gaz s’étendent sur des terrains adjacents : les deux derniers gazomètres sont construits en 1885.

Emplacement de l'usine à gaz de Saint-Mandé

Emplacement de l’usine à gaz – Fonds de carte OpenStreetMap

Les conditions de travail des ouvriers gaziers sont extrêmement rudes, les accidents sont nombreux, les brûlures causées par les cokes et goudrons sont les principales causes d’accidents du travail.

En 1907, la Société du Gaz de Paris, qui a repris les installations, cherche à améliorer sa rentabilité en fermant progressivement les plus anciennes usines dont fait partie l’usine de Saint-Mandé.

Mais la baisse de production due à la cessation d’activité de ces anciennes installations doit être contrebalancée par l’agrandissement et la modernisation des usines plus récentes. En effet, malgré la concurrence de l’électricité, la consommation de gaz continue à croître à Paris avec le développement de ses utilisations pour le chauffage et la cuisine.

Le renouvellement des installations est ralenti par la 1ère guerre mondiale et ce n’est qu’après l’hiver 1930-1931 que l’usine à gaz de Saint-Mandé peut cesser de fonctionner.

L'usine à gaz peinte par André Lhote en 1937

L’usine à gaz – André Lhote – 1937
© Musée d’art et d’histoire Paul Eluard de Saint Denis

 

Un nouveau quartier sous le signe du théâtre

Les terrains libérés par la destruction de l’usine à gaz sont rapidement occupés par des logements HBM (Habitations à Bon Marché) et des immeubles ILM (Immeubles à Loyers Modérés)

En 1935, l’église Saint-Gabriel est bénie par le cardinal Verdier.

En 1936, les squares Réjane et Sarah-Bernhardt sont inaugurés.

En 1937, s’ouvre le premier lycée de Jeunes Filles de l’Est de Paris, le Lycée de Jeunes Filles du Cours de Vincennes, qui va prendre en 1946 le nom de l’aviatrice Hélène Boucher ; son annexe des Maraichers deviendra en 1961 le lycée Maurice Ravel.

En 1939 c’est le terrain de sport Lagny qui est aménagé.

La plupart des nouvelles voies crées en 1934 et 1935 porteront le nom de personnalités théâtrales :

Beaucoup plus tard, en 2022, une allée à l’intérieur du square Sarah Bernhardt prendra le nom de Louise Abbéma, peintre et graveuse française, amie de Sarah Bernhardt.

Le square Réjane a une superficie de 3 650 m2, tandis que celui de Sarah Bernhardt s’étend sur 12 400 m2, ce qui en dit long sur les popularités respectives de ces deux actrices parisiennes qui ont pourtant eu des carrières internationales comparables.

Discours de M. Villey, préfet de la Seine à l'inauguration du square Sarah Bernhardt

Inauguration du square : Achille Villey, préfet de la Seine, prononçant son discours
Le Petit Journal – 10 mai 1936 – © Gallica BnF

Maurice Levillain, conseiller municipal du quartier, déclare lors de l’inauguration des squares Sarah-Bernhardt et Réjane que ce quartier de Charonne est devenu :

par l’effet des réminiscences musicales, théâtrales, littéraires, que font naître les noms donnés à ses voies nouvelles, un de ces lieux dont on peut dire que l’esprit y souffle.

Ainsi, la présence de vastes terrains occupés par des usines à gaz, l’une des industries les plus insalubres qu’ait connu Paris, a été gommée des mémoires. En donnant des noms de célébrités théâtrales aux nouvelles voies du quartier, on a réussi à oublier la noirceur de son passé gazier.

Fouilles Saint-Germain-de-Charonne

Conférence : l’archéologie parisienne et la fouille de l’église de Charonne

Notre association porte le nom « d’Histoire et d’Archéologie » et il faut reconnaître que nous abordons rarement le thème de l’archéologie. Nous en connaissons bien-sûr la raison : le 20e n’est pas très riche en ce domaine. D’où l’idée d’inviter un expert de la Ville pour nous aider à en savoir davantage dans ce domaine, sur Paris et sur notre arrondissement.

La conférence a lieu le jeudi 15 juin à 18h30 précises à la mairie du 20e

De sa naissance au XIXème siècle jusqu’à aujourd’hui, l’archéologie parisienne a profondément renouvelé ses méthodes et ses problématiques. Une présentation de ces évolutions permettra de mieux comprendre notamment la fouille récente de l’église Saint-Germain de Charonne.

Archéologie à Saint Germain de Charonne

Rapport de fouille de l’église Saint-Germain de Charonne

L’opportunité des travaux d’Haussmann

À cette occasion, rappelons que nous fêtons cette année les 170 ans de la nomination du préfet Haussmann à Paris, devenu surtout  célèbre par ses travaux et constructions qui ont transformé la ville. Qui dit travaux, dit destruction avant construction et au XIXème siècle, la préservation du patrimoine va prendre toute son importance avec les moyens matériels et humains pour sa recherche, sa collecte et sa protection.

Patrimoine visible et patrimoine caché

Pour assurer cette large mission, la Ville de Paris dispose de son Pôle archéologique, rattaché à la Direction des Affaires Culturelles (DAC). Cette Direction est dirigée depuis l’an dernier par l’ancienne ministre Aurélie Filipetti, et le pôle archéologique est lui-même issu à l’origine de la Commission du Vieux Paris.

Notre conférencier, Julien Avinain, est le responsable du Pôle archéologique de la Ville de Paris.

 

Extension d'Haussmann

Quand Belleville et Charonne intègrent Paris

Conférence à l’occasion des 170 ans de la nomination d’Haussmann en tant que préfet de Paris

 

Dans le cadre des Mardis de l’histoire de Paris, cycle de manifestations consacrées cette année au préfet de la Seine Georges Haussmann, l’AHAV a été invitée à présenter, le mardi 2 mai 2023, à 18h30, une conférence consacrée à :

1860 – Paris annexe ses faubourgs, l’exemple de Belleville et de Charonne,

par  Christiane Demeulenaere-Douyère, vice-présidente de l’Association d’histoire et d’archéologie du 20e arrondissement de Paris .

 Cette présentation sera suivie d’une autre conférence, consacrée à :

Les transformations de l’île de la Cité sous Haussmann,

par  Christine Bru – La Cité, société historique et archéologique de Paris Centre

Elles auront lieu dans l’auditorium de l’Hôtel de Ville de Paris (entrée 5, rue Lobau, Paris 4earr.). Entrée libre dans la limite des places disponibles, mais inscription obligatoire à Christine.gosse@paris.fr.

 

Les Mardis de l’histoire de Paris

Mme Karen Taïeb, Adjointe à la Maire de Paris en charge du patrimoine, de l’histoire de Paris et des relations avec les cultes vous invite chaque premier mardi du mois, à 18h30 à l’Hôtel de Ville pour ce nouveau rendez-vous gratuit et ouvert à toutes et tous.

Ces conférences sont animées par les sociétés et associations d’histoire des arrondissements parisiens.Chaque année, elles aborderont un thème spécifique.

En 2023, elles s’inscrivent dans la programmation de l’année Haussmann ; en effet, en 1853, le baron Haussmann est nommé préfet de la Seine par Napoléon III. C’est à lui qu’ont été confiés les Grands travaux de Paris sous le Second Empire. À l’occasion du 170e anniversaire du lancement de ces travaux d’envergure, la Ville de Paris propose tout au long de 2023 de nombreux événements.

Plus d’informations sur paris.fr (https://www.paris.fr/evenements/mardis-de-l-histoire-un-cycle-de-conferences-sur-l-histoire-de-paris-32170 et https://www.paris.fr/pages/haussmann-l-homme-qui-a-transforme-paris-23091).

Annexion de Belleville et Charonne

Conférence à l’HdV sur Belleville et Charonne intègrant Paris, par Christiane Demeulenaere-Douyère

Ancienne gare de petite ceinture

Charonne d’un mur à l’autre, promenade du 7 juin 2023

En partenariat avec la Société de l’histoire de Paris et de l’Ile-de-France, l’AHAV propose une balade-conférence « D’un mur à l’autre : à la découverte du Charonne d’hier et d’aujourd’hui », sous la conduite de notre vice-présidente, Mme Christiane Demeulenaere.

Elle aura lieu le mercredi 7 juin 2023, à partir de 14h30.

Le circuit partira de la place de la Porte de Bagnolet (Mo3 ou TRAM 3b, Porte de Bagnolet) et suivra la rue de Bagnolet -avec quelques « excursions »- jusqu’au boulevard de Ménilmontant.

Participation gratuite pour les membres à jour de leur cotisation.

ATTENTION places limitées : l’AHAV disposera de 10 places, pour lesquelles l’inscription est OBLIGATOIRE auprès de inscriptions@shpif.fr en indiquant vos nom et prénom et votre appartenance à l’AHAV, au moins une semaine avant la sortie. Le lieu de rendez-vous vous sera communiqué en retour.

Maquette partielle de la Ville de Paris

Le réaménagement de la Porte de Montreuil… qui en a connus d’autres

 

Qu’est-ce qui se passe concrètement actuellement à la Porte de Montreuil ?

La semaine dernière encore, la bataille faisait rage contre le projet de réaménagement de la porte de Montreuil, entre les Verts et leurs alliés de la majorité municipale. À l’origine, ce projet avait été voté en 2019 à la quasi-unanimité du Conseil de Paris. Pour l’instant , l’ensemble des travaux est prévu pour se terminer en 2026.

La porte de Montreuil, entrée stratégique de l’Est Parisien, est aujourd’hui un rond-point routier important laissant peu de place à une vie de quartier. Avec l’ambition du Grand Paris, une volonté de rétablir les liaisons entre la ville même et les communes limitrophes, notamment Montreuil et Bagnolet, une étude a été lancée en 2016 par la Ville de Paris pour développer un projet d’aménagement sur l’ensemble des “Portes du 20ème ”.

Bureaux et espaces verts prévus

Le projet actuel d’aménagement de la Porte de Montreuil, prévu pour 2026

Les objectifs de ce projet urbain sont multiples : pacification de la circulation, restauration de la ceinture verte et des continuités entre Paris, Montreuil et Bagnolet, diversification du tissu urbain, réhumanisation de zones désertées entre Paris et sa proche banlieue.  Dans le détail, le projet prévoit une « esplanade trait d’union » entre Paris et Montreuil de 3,5 ha avec une circulation automobile déplacée, et un réaménagement du marché aux Puces actuel en une halle fermée. Le projet global mêle re-végétalisation du terre-plein central, et développement de 60 000 m² de bureaux, commerces, services et équipements sportifs.

Des fortifs …

Au commencement était Charonne… s’étendant, à l’Est, aux limites de la commune de Bagnolet et sur la commune de Montreuil, jusqu’à l’emplacement actuel des rues d’Alembert et Armand Carrel.

Entre 1841 et 1844, sous Louis-Philippe, l’enceinte de Thiers est construite coupant la commune en deux, la majeure partie de Charonne restant à Paris. Ce sont les fortifications. 3 portes y sont percées : la porte de Ménilmontant (rue du Surmelin), la porte de Bagnolet (rue de Bagnolet) et la porte de Montreuil. Caractérisées par une bande de terre située en avant des bastions : la zone de tir de canon que l’on appelle donc « la zone », de 200 à 400 mètres de large, désignée dans les règlements d’urbanisme de Paris « non ædificandi » (non constructible). Même les arbres y sont abattus afin de dégager la vue aux défenseurs.

Marché aux puces de Montreuil en 1906

Marché aux puces de Montreuil en 1906-Wikipedia

Dès 1871, une population pauvre, à laquelle on donnera tout d’abord le nom de « zoniers » commence à s’installer sur ces terrains en y construisant des cabanes en tout genre. Ce sont essentiellement des ouvriers parisiens chassés par les transformations de Paris sous le Second Empire, la spéculation immobilière et les grands travaux du baron Haussmann, ou des paysans chassés par l’exode rural. La Zone compte vite jusqu’à 30 000 habitants, montant jusqu’à 42 000 habitants, entre les deux guerres mondiales.

C’est ainsi que s’installe le marché dit « aux puces » de la Porte de Montreuil, l’un des plus anciens de Paris puisqu’il existe de façon informelle depuis 1860. Les chiffonniers, qui ramassent les vêtements usagés au pied des immeubles parisiens vont donc s’installer à la périphérie de la ville dans cette zone, où ils les revendent à bas prix. La première expression « marché aux puces » se trouve dans l’Écho de Paris du 23 juin 1891 à propos d’une rixe entre brocanteurs à la barrière d’octroi de Montreuil-sous-Bois.

Tramways à chevaux

La Porte de Montreuil et sa station de tramways. Carte postale de 1907-Wikipedia

… au périph’

Un décret sur la zone de servitude militaire du 19 mars 1925 prévoit le rattachement à Paris des territoires de l’ancienne zone. Et en 1939, la plupart des terrains de l’ancienne enceinte sont encore en jachère. Mais la Zone va ainsi peu à peu disparaître jusqu’en 1956, avant le premier coup de pioche du boulevard périphérique.

Tout d’abord, on retient l’idée d’y construire des logements sociaux, une « ceinture rouge » de 40 000 habitations à bon marché ou les HBM en briques, qui ceinturent Paris.

Les fortifications Porte de Montreuil

La porte d’Avron, passage des fortifications

Dès les années 1940 naît surtout l’idée de créer une route circulaire autour de Paris, pour décongestionner les grands boulevards, notamment ceux des Maréchaux, encombrés par les voitures de plus en plus nombreuses dans la capitale.

Après la Seconde Guerre mondiale, la démocratisation de l’automobile amplifie cette réflexion : il faut construire une nouvelle ceinture, cette fois-ci dédiée aux voitures, construit en grande partie sur le tracé des anciennes fortifications.

Le boulevard périphérique de Paris sera construit de 1956 à 1973, continuant de matérialiser et même accentuer la séparation entre Paris et sa banlieue.

Après les fortifs, le périph, viennent les manifs à cause de nouvelles modifs. Quelle va être la nouvelle Porte de Montreuil ?

Au XXIème siècle, la Porte de Montreuil continue d’écrire son histoire ….

Campagne gaz à tous les étages

Le gaz à Paris et au cours de Vincennes

Actuellement, les ouvriers creusent des tranchées dans nos trottoirs. Il s’agit ce mois de janvier des travaux de rénovation des canalisations de gaz naturel. Cette intervention de GRDF est prévue pour se terminer le 31 mars 2023. L’occasion pour nous d’évoquer l’histoire du gaz à Paris… jusqu’au cours de Vincennes.

Travaux de gaz dans le 20e arrondissement

Chantier GRDF 2023 longeant le haut du Père Lachaise-PG

À l’origine du gaz d’éclairage, Philippe Lebon

Entre 1785 et 1786, Philippe Lebon invente le gaz d’éclairage en France. Ses travaux l’amènent à mettre en évidence les propriétés des gaz de distillation du bois.

Il dépose le 28 septembre 1799 un brevet pour sa « thermolampe » et, en août 1800, publie un mémoire sous le titre suivant :

« Thermolampes ou poêles qui chauffent, éclairent avec économie, et offrent, avec plusieurs produits précieux, une force applicable à toutes espèces de machine ».

Son mémoire annonce la possibilité de distiller la houille. Le 11 octobre 1801, il installe ce système dans l’hôtel de Seignelay à Paris (7e arrondissement) : il s’agit là du premier éclairage à gaz. En mourant prématurément en 1804, Philipe Lebon n’aura pas pu développer ses découvertes.

Les débuts du gaz de houille

Le mémoire de Lebon est traduit et lu par ses successeurs anglais et allemand, William Murdoch et Frédéric-Albert Winsor, qui seront à l’origine de l’essor de l’industrie du gaz en Angleterre en utilisant la houille et non le bois.

Frédéric-Albert Winsor (enterré au Père Lachaise), se rend à Londres pour faire ses expériences en public.  Il fonde en 1807 la « Gas Light and Coke Compagny », une société d’éclairage général au gaz pour les rues, les usines, les boutiques, les hôtels et les maisons bourgeoises de Londres.

Tombe de Winsor

Winsor au Père Lachaise dessin de 1831- musée Carnavalet

En 1814, le brevet de Lebon tombe dans le domaine public et Winsor en profite pour déposer à Paris une demande de brevet, qu’il obtient en janvier 1816. Il entreprend alors l’éclairage au gaz du passage des Panoramas (2e arrondissement) et il fonde en 1817 à Paris la première compagnie de gaz.

À cette époque, les défauts du gaz de houille sont multiples en particulier le risque d’explosion des gazomètres, la dangerosité du monoxyde de carbone (CO) et une odeur insupportable, due, pour l’essentiel, au sulfure d’hydrogène (H2S).

Gaz en1815-1860

Controverses anciennes sur le gaz-Courrier de l’ INRA 2012

Pour combattre les peurs des utilisateurs, Winsor raconte, sans beaucoup de succès, que :

 « Le gaz est un calmant très-doux, un remède efficace contre les irritations de poitrine : aussi les médecins habiles, ajoutait-il, ont recommandé d’en mettre dans des vessies, sous le chevet des personnes affectées de maladies pulmonaires, afin que, transpirant peu à peu de son enveloppe, il se mêle à l’air que respire le malade et en corrige la trop grande vivacité ».

L’industrie du gaz mettra des années à se développer et la compagnie créée par Winsor fera faillite.

 

D’où provient le gaz de ville ? Un peu de chimie

Le gaz de ville ou gaz de houille provient de la distillation de la houille dans des cornues, autrement dit des fourneaux industriels. Cette distillation permet d’obtenir un gaz brut riche en hydrogène, méthane, monoxyde de carbone, goudron de houille, sulfure d’hydrogène qui est un gaz toxique et malodorant, et surtout 75% de coke.

L'industrie du gaz

Schéma de fabrication du gaz d’éclairage-MEGE

Le goudron de houille est utilisé pour le calfatage des bateaux. La vente du coke à elle seule couvre le prix d’achat de la houille. Le gaz, stocké dans des gazomètres après distillation est acheminé à sa destination via un réseau de canalisations.

 

Le développement du gaz d’éclairage

Les progrès techniques et la nécessité de remplacer l’ancien éclairage à l’huile entraînent un développement rapide du gaz de ville.
En 1821, Paris compte quatre usines à gaz et, en 1824, les premiers essais des lanternes à gaz sont effectués dans l’ancienne galerie de Fer, située boulevard des Italiens et qui rejoignait la rue de Choiseul.

Près de dix ans plus tard, le préfet de la Seine, Claude-Philibert Barthelot de Rambuteau, développe l’utilisation du gaz qui sera parachevée par le préfet Haussmann sous le Second Empire. Il généralise l’éclairage au gaz : à son arrivée en 1833, Paris comptait 69 becs de gaz ; on en dénombre plus de 8 600 à son départ, en 1848.

La compagnie du gaz de Belleville en 1835

Carte du réseau gaz à Paris avant 1860, dont celui de la Compagnie de Belleville en 1835-MEGE

À l’arrivée du second Empire, les célèbres financiers et hommes d’affaires de cette époque, les frères Pereire, prennent une part active à l’essor du gaz à Paris. Ils font notamment partie des bénéficiaires du traité de concession de l’éclairage et du chauffage au gaz à Paris. Celle-ci est signé le 23 juillet 1855, et accordée pour cinquante ans à six compagnies. Et c’est ainsi que de 1856 à 1889, de grandes usines à gaz de houille sont construites dans la ville et sa périphérie.

En 1889, le gaz éclaire toute la ville avec 1 800 000 becs de gaz privés et 55 470 becs d’éclairage publics. Un gaz aux multiples usages : éclairage, chauffage, eau chaude, cuisinière à gaz, etc. Le « confort gaz » (cuisine, eau chaude, chauffage), s’installe dans les foyers parisiens, d’abord ceux des plus aisés, il s’étendra par la suite à une clientèle plus modeste. 

En 1905, les immeubles modernes affichent sur des plaques métalliques bleues l’emblème de la nouveauté et du luxe : « Gaz à tous les étages ».

Mise en avant du gaz dans les immeubles

le gaz, luxe du début du 20ème siècle.

On comptait à Paris en 1906, 11 usines à gaz et plus de 600 000 abonnés

La fin des usines à gaz de houille

Vers 1910, un concurrent redoutable arrive : l’électricité. Les installations nouvelles adoptent majoritairement l’électricité. L’éclairage public au gaz continue pourtant longtemps à illuminer Paris : 90% de ses appareils sont encore au gaz en 1923. Il faudra attendre le début des années soixante pour voir disparaître le recours à ce type d’éclairage, place de la Concorde.

La découverte du gisement de Lacq en 1951, provoque la fin de l’industrie du gaz de houille. Les usines à gaz ferment progressivement : en 1956, celle de La Villette, Clichy en 1960, Gennevilliers en 1961, en 1977, l’usine Nord (le Landy et le Cornillon) cessent définitivement toute activité.

En 1967, le gaz naturel, en provenance de Lacq, de Russie et d’Algérie, approvisionne quelques 850 000 foyers parisiens et, le 21 mars 1979, la dernière torchère de gaz manufacturé s’éteint. Le gaz naturel a désormais remplacé le gaz de houille.

L’existence d’un gazomètre dans notre arrondissement

Dans le 20e arrondissement, une importante usine à gaz se trouvait le long du Cours de Vincennes. Sa démolition a permis de libérer un vaste terrain qui sera utilisé pour la construction du Lycée Hélène Boucher, de squares et d’autres bâtiments.

gazomètre du 20e arrondissement

L’usine à gaz cours de Vincennes vers 1900